Interview de Thierry D'ATHIS

Ancien Grand reporter au Figaro, spécialiste des questions de défense, Thierry d'ATHIS lui même ancien parachutiste (6ème RPIMa 62/64) répond à nos questions, évoque le troublant et anti-patriotique comportement de la conseillère Municipale "MOREL" de Vannes et adresse un message de sympathie à nos soldats en opération.



ANSSO -

Il y a 1 an vous étiez le premier et un des rares à réagir très durement à la publication par Paris-Match d’un soit disant reportage sur les talibans à l’origine de l’embuscade dans laquelle nous perdions 10 de nos camarades. Ce reportage aurait été acheté par Paris-Match. Pouvez-vous revenir sur cet épisode peu glorieux du journalisme de terrain et symbole d’une perte des repères ?


Thierry d'ATHIS -

Dès la parution de ce « reportage », j’ai été, en effet, scandalisé - c’est un euphémisme -  par le procédé. Car il ne s’agissait pas d’un véritable reportage de guerre conçu en direct mais d’une mise en scène « théâtrale » commune entre des adversaires qui revendiquaient cette embuscade mortelle et un support d’information qui se faisait ainsi le complice de l’ennemi.  En plus, contrairement à l’impression qu’il donnait, le journaliste n’a jamais été sur place mais a écrit de son bureau situé au Pakistan. Du coup, j’ai fais parvenir une lettre de protestation à la direction de Paris Match qui n’a pas eu le courage de la publier. J’ai eu la très grande tristesse de me rendre compte que j’ai été le seul journaliste à protester contre cette grave faute d’éthique professionnelle.  Frédéric Pons, président de l’Association des Journalistes de Défense m’a néanmoins soutenu. Sur le fond, je m’étonne, que l’Etat, qui en avait les moyens, vu les relations qui existent entre celui-ci et le groupe Lagardère, ne soit pas intervenu en exigeant que ce faux reportage ne soit pas publié… Manque de courage ? Surement. Peur de froisser un milieu que l’on redoute ? Surement. Un événement qui concrétise une perte de repères et une absence d’éthique dans ces milieux que je connais bien. C’est flagrant. Et  elle s’accélère.


ANSSO -

Pour continuer dans le sens de cette perte des repères « patriotiques », que vous inspire le comportement de la conseillère municipale Mme Morel qui a refusé de se lever lors de la minute de silence en hommage aux morts du 3eme RIMa lors du conseil Municipal du 16 octobre 2009 ?

Thierry d'ATHIS -

C’est proprement incroyable… C’est le symbole vivant d’une décrépitude civique et d’un profond malaise qui s’est installé entre l’armée professionnelle d’aujourd’hui et la population. Malaise qui vient du fait que le pays ne sait pas exactement pour quelles raisons on a engagé le meilleur de nos unités en Afghanistan. Sentiment que nous sommes devenus les supplétifs des Américains. Et puis, il perdure une pensée anti-militariste dans certains milieux dits intellectuels. Pour certains,  tout ce qui ressemble de loin ou de près à une couleur kaki est symbole  de « fascisme.» On a connu ce genre de réactions lors de la guerre d’Algérie où les « porteurs de valises » étaient parfois «reconnus» pour ne pas dire encensés !

ANSSO -

Pourquoi seule la France est malade de ses valeurs et a honte de son drapeau, de son armée et n’ose afficher un patriotisme sain et de bon aloi nécessaire à toute identité nationale ? (peut-être modifier la question pour rebondir sur le « débat »  - y-a-t-il à débattre - sur l’identité nationale ???)


Thierry d'ATHIS -

Tout simplement parce que l’Histoire réelle du pays, l’Histoire positive n’est pas mise en exergue dans l’enseignement de nos enfants. Que cette histoire est vite relatée et que, trop souvent, au lieu d’expliquer tous les ponts de vue réels de notre Histoire, nos enseignants mettent en exergue les côtés négatifs. D’où cette repentance, souvent exagérée ou peu légitime. L’Histoire est souvent grise et partagée entre les « bons » et les « méchants » du temps présent. Mais peut-on juger du passé avec la philosophie régnante d’aujourd’hui ? Au lieu de faire de l’Histoire nous faisons de la Morale. Etre  Français, c’est respecter nos règles communes et défendre les intérêts du pays. L’identité Française c’est, tout simplement, adhérer à nos lois et à notre histoire – à toute notre longue histoire- et vouloir défendre le pays lorsque les événements l’exigent. Comment faire passer cette idée simple alors que l’on voiet fleurir des drapeaux étrangers sur notre sol après des résultats sportifs qui ne devraient pas concerner les français.

ANSSO -

Vous avez récemment écrit un ouvrage sur la PMP, la « suspension » du SN est-elle une des cause de ce manque d’identité nationale (entre autre cause) ?

Thierry d'ATHIS -

Absolument. C’est, de mon point de vue la plus grave faute politique commise depuis la fin de la guerre. Le service national était la seule institution qui pouvait brasser toutes les couches sociales. Le lien Armée-Nation était forcément pris en compte par le système. Aujourd’hui, la défense du pays est assurée par des professionnels qui sont presque devenus des « mercenaires.» Du coup, ce lien n’existe plus et on parle de syndicats dans l’armée et on revendique les 35 heures et on n’accepte plus la mort….  Et quid, d’un plan national Vigipirate, en cas de coup dur ? Avec quels moyens humains ? La préparation militaire qui subsistait après la suspension du Service National, et spécialement la pm para, maintenait vaille que vaille ce lien dans la mesure où tous et toutes étaient volontaires. Idéalisme, dévouement, dépassement de soi animaient tous ces jeunes pour lesquels elle fut une expérience inoubliable. Hélas, des considérations exclusivement, budgétaires, - voir la question écrite de Benoist Apparu avant qu’il ne soit ministre- ont amené sa disparition sans que soit pris en compte l’aspect de formation morale apportée aux jeunes, lesquels en ont pourtant actuellement plus besoin que jamais ! L’esprit de défense, le patriotisme, la camaraderie, les valeurs morales sont présentes à chaque page de mon livre.

 

ANSSO -

Ancien Grand reporter et vous-même ancien parachutiste, quel message souhaitez vous adresser à nos camarades qui se battent en Afghanistan ?

Thierry d'ATHIS -  

Je leur dirai toute mon admiration car ils sont passés en quelques mois d’un esprit de maintien de la paix, presque à un esprit d’ « humanitaire » qu’on leur avait inculqué,  à un esprit de combat. Et quel combat ! Un combat que leurs anciens ont vécu en Indochine et en Algérie. Un combat auquel ils n’étaient pas préparés moralement et matériellement. Je leur souhaite surtout de préserver leurs vies car, de mon point de vue,  contrairement à ce que nos responsables affirment, nous n’avons rien à gagner là-bas depuis que notre « allié » Massoud a été liquidé. Par qui ? Personne n’a apporté encore une réponse logique.

 


Né en 1940, Thierry d'ATHIS est par ailleurs pupille de la Nation, et Chevalier dans l’Ordre National du Mérite.

Diplômé du CHEAr (Centre des Hautes Etudes de l’Armement, 26ème session-promotion 89-90), ancien Vice-Président de l’Association Professionnelle des Journalistes de l’Aéronautique et de l’Espace, AJPAE,  Membre de l’association d’anciens parachutistes « Qui Ose Gagne et anciens du 6 » dont le siège est à Bayonne. (1500 adhérents), Président de l’UNP (Union Nationale des Parachutistes) -Versailles
Membre de l’Association des Journalistes de Défense, il est l'auteur en juin 2009 du « Le Livre d’Or de la PM PARA » (Editions LBM)




LETTRE ADRESSÉE A PARIS-MATCH



Messieurs,

Ayant très bien connu plusieurs de vos collaborateurs, rédacteurs, grands reporters ou photographes, certains sont encore mes amis, j'avais une certaine admiration pour l"esprit "PARIS-MATCH"...

Aujourd'hui, je tombe des nues... Je rêve... C'est terrible... Vous êtes devenus fous... Comment avez-vous perdu tout sens moral, tout sens éthique...

Ayant une double légitimité à vous écrire ( journaliste à la retraite - Europe 1, RTL, Le Figaro... et ancien parachutiste- lire mon cv ci-joint)
je vous transmets mon profond dégoût, ma répulsion et mon mépris total suite à l'incroyable "reportage"
que vous avez publié concernant ces "talibans".

Aucune justification que vous avez émise depuis la parution de votre " torchon" ne tient un seul instant la route.

Non seulement vous avez complètement trahi l'éthique professionnelle ( si elle existe encore! ) en vous faisant totalement (malgré vos dénégations) les complices ( ils sont maîtres de ce type d'opérations) de ceux qui ont tué nos compatriotes ( Imaginez un seul instant une interview du même type à l'époque de la guerre d'Algérie...) mais vous avez également commis un acte de trahison.

Je l'affirme haut et fort. Vous avez trahi votre pays et vous en méritez les conséquences. Si ce mot bien sûr a encore une valeur aujourd'hui.

Votre campagne de "pré-vente" a été remarquablement orchestrée ( c'est un comble !!!) . Il vous fallait, en plus, "vendre" à tout prix ... Il vous fallait faire du tirage sur ce thème... Bravo ! Chapeau ! Vous ajoutez l'abject à l'abject...

J'ai écouté ( sur Europe1 entre autres supports ), les explications de votre photographe ( la pauvre... elle bafouillait un charabia incompréhensible... Elle semble être un pauvre pantin manipulé...)

Comment croire un seul instant que vous ayez pu contrôler cette opération. Vous êtes des irresponsables. L'acte que vous avez commis est immonde.
J'ai honte de me dire journaliste aujourd'hui... Et en plus vous parlez d' "ETHIQUE"... C'est à pleurer. Déjà, j'avais trouvé votre précédent N° assez choquant. Comme d'habitude vous avez du rétribuer ces pauvres familles en leur demandant de vous fournir des documents personnels. Vous appelez cela "Faire de la RECUP" N'est-ce-pas ?

J'imagine la réaction de Jean-Pierre Biot, votre ancien photographe ancien para comme moi...

Paris-Match, est devenu aujourd'hui le choc de la Honte et le choc de l'Imposture.

Je ne lirai désormais plus jamais votre magazine...


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